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Voir leçon 1 - Qui parcourt les plus grandes distances et leçon 2 - Envole-toi, petit oiseau
Pleins feux sur le fuligule milouinan et le fuligule à tête noire
Le fuligule milouinan s’est maintenant joint au fuligule à tête noire (dans la région depuis le début septembre) pour faire escale sur quelques-uns de nos plus grands lacs. Les deux fuligules sont en route pour leur aire d’hivernage et se ressemblent beaucoup; on les distingue par de légères différences dans la dimension de la tête et la forme du bec (le fuligule milouinan a une tête plus ronde et un bec plus large). Le plumage d’hiver du mâle est assez différent de celui qu’il porte pendant la saison de reproduction, d’un noir, gris et blanc spectaculaire. La femelle a un plumage plus brunâtre et une tache pâle au-dessus du bec. Le fuligule est un canard plongeur, et le fuligule à tête noire représente la plus grande population de ces oiseaux en Amérique du Nord.
Malgré son importance démographique en Amérique, le fuligule est en déclin. De 1978 à 2007, le fuligule milouinan et le fuligule à tête noire sont passés d’une population de 6 millions d’oiseaux à 3,5 millions d’oiseaux. Avec trois espèces de macreuse (à front blanc, noire, et brune), le fuligule milouinan et le fuligule à tête noire sont les seules espèces communes de canard en Amérique du Nord à enregistrer une baisse démographique depuis 1987. Le fuligule a récupéré près de sa moyenne de population à long terme (mais pas ses sommets des années 80) en 2016 avant de chuter à 20 % en dessous de la moyenne en 2017 et 2018, et encore plus en 2019. En 2022, la baisse était de 28 %, et en 2023, 29% inférieur à la moyenne à long-terme. En 2024, le scaup est remonté à 17 % en dessous de la moyenne, mais la chute globale précipitée reste préoccupante. Chercher à découvrir pourquoi, c’est entreprendre une étude fascinante sur le fonctionnement de la science qui nous permet d’apprendre que tout, bien sûr, est lié. Un article sur ce phénomène est paru en 2007 dans une revue publiée par Canards Illimités. Nous reproduisons ici les grandes lignes du texte, (en anglais seulement) intitulé Le mystère Fuligule Grande
1. Le fuligule en migration fait désormais escale en grands nombres dans la région des Grands lacs pour se nourrir de la moule zébrée, une espèce invasive. La moule renferme de grandes concentrations de toxines, y compris du sélénium, un élément chimique qui, en grandes quantités, peut entraîner des malformations ou la mortalité chez le caneton et des problèmes de santé chez l’adulte. Des études préliminaires ont démontré que le fuligule absorbe et emmagasine du sélénium en consommant des moules zébrées.
2. Cela dit, des études menées dans des lieux de couvaison, dans les forêts boréales et les espaces verts de l’Ouest, ont montré que les concentrations de sélénium trouvées dans des œufs de fuligule étaient en deçà des niveaux critiques, et la plupart des œufs en observation sont éclos. Les femelles étudiées aux lieux de couvaison avaient une concentration de sélénium moins élevée que celles que l’on a échantillonné dans des aires d’hivernage et de reproduction. Comment cela se fait-il?
3. Des chercheurs étudiant des oiseaux en captivité ont conclu que la femelle nicheuse éliminait rapidement la plupart du sélénium qu’elle avait absorbée dès qu’on ne lui donnait plus de nourriture contaminée. Il semblerait que les lieux de couvaison ne sont généralement pas contaminés par le sélénium; pour cette raison, il est probable que les oiseaux ayant des niveaux élevés de sélénium au moment d’atteindre la halte migratoire aient réussi à en éliminer suffisamment au moment de pondre leurs œufs. Le sélénium n’entraverait donc probablement pas la reproduction du fuligule. Or, les chercheurs ne savent toujours pas si c’est la contamination au sélénium qui empêche certains oiseaux de se rendre aux lieux de couvaison ou à ne pas se reproduire une fois sur place. Il s’agirait là d’oiseaux qui passent l’hiver dans des zones contaminées.
4. Les terres humides ne disparaissent pas toujours sous l’effet des changements climatiques : parfois, elles se réchauffent plus tôt au printemps et atteignent une température plus élevée en été. Selon des recherches menées à ce sujet, une telle variation affecte le type et le nombre d’invertébrés qu’accueillent les terres humides, et ceux que préfèrent manger le fuligule femelle et juvénile s’y trouvent désormais en moins grand nombre. Ce changement pourrait de ce fait ralentir la croissance des canetons et entraver le développement des plumes d’ailes des jeunes et des femelles s’étant reproduites, ce qui pourrait réduire le taux de survie du canard lors de son parcours migratoire.
5. Depuis, les scientifiques se sont intéressés aux lieux de couvaison eux-mêmes et ont découvert une tendance inquiétante. Dans les forêts boréales d’Alaska et de Sibérie, les terres humides disparaissent — dans certains cas, on assiste à l’assèchement de zones entières. Ces pertes ont été associées au changement climatique, un phénomène qui, semble-t-il, aurait rompu le sceau qui entoure le pergélisol. Ce sceau retient l’eau que contiennent les terres humides et les lacs; sans lui, l’eau est absorbée dans le sol. Or, des chercheurs qui se penchaient sur plusieurs lieux de couvaison d’importance situés en Alaska ont constaté que 25 pour cent des terres humides que contenait cette région sont disparues depuis 1950, et surtout au cours des 20 dernières années. Aucune recherche n’a encore été menée au Canada sur ce changement d’habitat dans les lieux de reproduction du fuligule, mais les conclusions pourraient être les mêmes.
6. Il est également possible qu'une diminution du piégeage a augmenté les populations de prédateurs des fuligules dans certaines régions. De toute évidence, l’histoire du fuligule n’est pas terminée, et il s’agit sans doute d’un oiseau à surveiller de près.
Alerte à l'envahisseur!
La moule zébrée a fait son entrée au Canada en 1986 comme passagère clandestine des eaux de ballast dans les cales de navires venues d’Europe et d’Asie qui circulaient dans le fleuve Saint-Laurent et ils continuent à se répandre. Les Grands lacs offraient l’habitat idéal pour la moule zébrée qui s’y épanouit à un point tel qu’elle est désormais l’une des dix espèces aquatiques les plus invasives en Amérique du Nord. Mais comment un si petit mollusque peut-il causer tant de dommages? Pour comprendre, il faut savoir qu’une moule zébrée peut pondre un million d’œufs dans l’espace d’un été. Cette productivité remarquable mène à la création d’immenses colonies de moules zébrées qui ne tardent pas à faire concurrence aux moules indigènes, lesquelles finissent par être étouffées. Toutes ces moules ont beaucoup d’appétit, et leur technique d’alimentation par filtration est tellement efficace qu’elles finissent par éliminer la quasi totalité du plancton dans la colonne d’eau. Non seulement cette situation a-t-elle un effet important sur les réseaux alimentaires indigènes, mais la transparence accrue des eaux qui en résulte crée les conditions idéales pour des problèmes d’écosystème tels la formation de floraisons d'algues toxiques. La moule zébrée se répand quand sa larve microscopique, dite larve véligère, réussit à s’infiltrer dans le vivier d’un bateau. Ainsi, tout comme on nous conseille de ne jamais prendre à bord des gens qui font de l’auto-stop, pensez à prendre quelques précautions très simples la prochaine fois que vous irez sur l’eau. Vous veillerez à la sûreté des habitats aquatiques en empêchant la moule zébrée de se rendre à une nouvelle destination!
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